Les modes alternatifs de règlement des conflits en droit public, par Benjamin INGELAERE Avocat.
Les modes alternatifs de règlement des différents conflits ont connu depuis de nombreuses années un important développement.
La dernière loi, celle du 18 novembre 2016 dite de modernisation de la justice du XXIe siècle accompagnée par le décret du 2 novembre 2016, ont ouvert de nouvelles voies visant à désengorger les juridictions administratives.
La médiation, la transaction ou le retrait volontaire des actes administratifs sont les voies les plus courantes, les dernières dispositions légales visant sans conteste à accroître le recours à la médiation ainsi qu’à la transaction.
Dès lors, en se référant à la formule la plus utilisée, il faut lorsque l’on évoque ces outils de règlement amiable des conflits retenir que leur objectif et de parvenir à un régler un différend sans recourir au juge.
LES RECOURS GRACIEUX ET PREALABLE.
En premier lieu, le règlement d’un contentieux sans en recourir au juge est le plus classique à savoir la disparition d’un acte administratif à l’initiative de la collectivité, ce sont les fameux recours administratifs préalables, gracieux ou hiérarchiques.
Il existe donc deux sortes de recours administratifs préalables, le recours gracieux qui est alors adressé à l’autorité ayant pris la décision ou le recours hiérarchique adressé au supérieur de cette autorité.
Nous rappellerons également que ces recours sont les recours cousins des recours préalables indemnitaires visant l’obligation de liaison du contentieux en matière indemnitaire.
Ces différents recours préalables doivent permettre d’éviter un contentieux dans la mesure où l’autorité destinataire de ces recours préalables entendrait retirer ou abroger la décision contestée voire à indemniser le préjudice tiré de la prise d’une décision administrative.
Malheureusement à titre d’expérience, justiciables, avocats ou décideurs locaux peuvent témoigner de ce qu’en réalité dans la pratique il est très rare que des recours préalables soient entendus favorablement par l’autorité destinataire et bien souvent cela conduit à une saisine des juridictions administratives, saisine qui dans au moins 30 % des cas pourrait être évitée si les parties décidaient d’un commun accord de pousser un peu plus loin et surtout un peu plus longtemps les discussions amiables.
LA MEDIATION ADMINISTRATIVE.
Le sujet de la médiation dans le domaine de la justice fait régulièrement les gros titres de la presse spécialisée et des différents acteurs du droit depuis maintenant trois années.
Mais qu’en est-il vraiment en matière administrative ?
Il n’est pas contestable que la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice au XXIe siècle a profondément remodelé le recours à la médiation administrative. Ainsi qu’il est fort justement rappelé dans un article paru dans l’« Actualité juridique des collectivités territoriales » par Monsieur Yvon GOUTAL, le recours à la médiation est « Une volonté persistante, mais un échec consommé ».
Il a donc été nécessaire de mettre en place une réforme profonde. Ainsi les dispositions du Code de justice administrative ont sur ce point étaient remaniées en profondeur. Désormais, l’expert judiciaire qui est mandaté par une juridiction administrative dans le cadre d’un référé expertise peut se voir confier des missions de médiations, ce qui est particulièrement important.
Désormais, la possibilité pour ce dernier de se draper dans le rôle de médiateur pourrait être un atout indiscutable pour un solutionnement amiable de dossiers parfois bien techniques.
Il est également possible pour les parties de demander au président du tribunal administratif ou de la cour territorialement compétente d’organiser une mission de médiation ou de désigner la ou les personnes qui en seront chargées ou de lui demander de désigner la ou les personnes qui sont chargées d’une mission de médiation qu’elles ont elles-mêmes organisée.
Bien entendu, la question qui restait en suspend était celle des délais de recours contentieux puisque bien souvent l’inquiétude légitime des demandeurs est celle de la préservation des délais de recours. Et bien sur ce point, il est donc logique que le législateur soit venu favoriser l’engagement des médiations préalables à l’exercice d’un recours contentieux en rédigeant l’article L213-6 du Code de justice administrative. Cet article précise, s’il fallait encore l’indiquer, qu’en cas d’organisation d’une médiation en dehors de toute procédure juridictionnelle les délais de recours contentieux seront interrompus et les prescriptions suspendues à compter du jour où après la survenance d’un différent, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à défaut d’écrit à compter du jour de la première réunion de médiation.
Nous regretterons seulement sur ce point que le statut du médiateur ne soit pas davantage précisé puisque seule la justification « d’une formation et d’une expérience adaptée à la pratique de la médiation » est indiquée, ce qui ouvre un champ des possibles non négligeable.
De notre avis et en guise de conclusion, nous espérons bien que ce processus de médiation soit voué à un succès certain en matière administrative, tant la nature même de la justice administrative semble être un terrain propice à la mise en œuvre de cette médiation, les avocats en droit public étant par définition particulièrement rodés à la nécessité de mettre en place des recours préalables, obligatoires ou facultatifs à la saisine des juridictions administratives.
Il n’est donc par rare, par nature, d’être amené à engager des discussions amiables avec les contradicteurs de manière systématique dans des dossiers finalement contentieux.
Il s’agit donc ici d’une réforme particulièrement bienvenue, attendue, et appréciée à n’en pas douter par les futurs collaborateurs des acteurs publics.
INGELAERE AVOCATS, Droit de la fonction publique, Droit de l'urbanisme, Droit des collectivités territoriales, Droit des marchés publics.
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