Recrutement des universitaires et impartialité des jurys de concours : Hésitation du Conseil d’État.
Au terme d’un arrêt rendu par le Conseil d’État, des 4ème et 5ème chambres, réunies en date du 7 juin 2017, n° 382986, le Conseil d’État est venu rappeler l’état général de la jurisprudence ainsi que les dispositions légales applicables aux difficultés liées au recrutement universitaire et à l’impartialité des jurys de concours.
Dans cette affaire, une candidate à un concours de professeur des universités a entendu contester la délibération par laquelle le comité de sélection a décidé, lors de la première phase du concours, de ne pas retenir sa candidature en vue de l’audition décisive devant se tenir ultérieurement.
Au terme de sa requête devant le Conseil d’État, la requérante entend se prévaloir d’une méconnaissance du principe d’impartialité puisqu’en effet, le président du jury, avec qui elle avait eu par le passé une relation affective, entretenait depuis avec elle des relations notoirement détestables et conflictuelles.
De manière particulièrement stricte, le Conseil d’État retient, de manière pour le moins surprenante, que la seule présence de son ex-amant au sein du jury de concours, bien que ce dernier fût président du jury, ne méconnait pas l’exigence d’impartialité.
Ce qui est également intéressant, dans le cadre de cet arrêt rendu, est que le Conseil d’État fournit, en termes d’analyses, un certain revirement puisqu’il affirme, contrairement à ce qu’il avait jugé très récemment, qu’un membre trop proche d’un candidat doit s’abstenir de participer au jury, mais uniquement pour le candidat dont il est proche et non pour l’intégralité des candidats.
Nous rappellerons à ce sens qu’il a été fixé par le Conseil d’État à propos d’examens professionnels, que les membres du jury doivent s’abstenir à participer aux travaux dès lors qu’ils ont « avec l’un des candidats des liens attenants à la vie personnelle ou à des activités professionnelles qui seraient de nature à influencer son appréciation » (Conseil d’État, 17 juillet 2008).
Cette décision, que l’on peut juger comme surprenante, est notamment motivée dans les conclusions du rapporteur public par une appréciation in concreto.
Plaidant pour une lecture de la décision pour le moins libérale, le rapporteur public avait entendu souligner dans ses conclusions qu’une ancienne relation conjugale, entre un membre du jury et l’une des candidates, ne doit pas, par elle-même et à elle seule, être regardé automatiquement et systématiquement comme un manquement à l’impartialité.
Ainsi, doivent être prises en compte plusieurs considérations d’ordre « circonstanciel ». Ici, c’est l’antériorité des liens et donc la temporalité de la relation intime entre le membre du jury et la candidate qui a joué en faveur du jury et en défaveur de la candidate malheureuse.
Le caractère récent ou ancien des relations suspectes entre la candidate et le membre du jury apparait donc, à ce jour, comme l’élément majeur d’appréciation de l’opportunité de contester une décision de rejet d’une candidature.
BENJAMIN INGELAERE, AVOCAT.