Quel intérêt à agir contre un permis de construire ? 

Comment apprécier la notion d'intérêt d'agir ?

Un arrêt récent rendu par le Conseil d'Etat vient juger que des propriétaires de terrain situé à  moins de 150 mètres d'une future construuction d'un centre commercial ne démontrent pas de cette simple proximité, un intérêt à agir, dès lors qu'ils ne prouvent pas que cette future construction porterait une atteinte directe aux conditions d'occupations, d'utilisation ou de jouissance du bien.

"Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, que la société AG-Zinate est propriétaire d'un terrain non construit situé à moins de 200 mètres du terrain d'assiette du projet litigieux, d'autre part que la société Les Charmes est propriétaire d'un équipement commercial situé à moins de 150 mètres de ce terrain. La cour administrative d'appel de Nantes, qui a nécessairement considéré que ces deux sociétés ne pouvaient être regardées comme des voisines immédiates du projet, a relevé que ces deux sociétés se bornaient à faire valoir la proximité de leurs terrains et les nuisances susceptibles d'être causées par le projet, sans apporter d'éléments suffisamment précis de nature à établir qu'il en serait résulté une atteinte directe aux conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur bien, sur lesquelles elles n'avaient apporté aucune précision. En estimant qu'ainsi, elles ne justifiaient pas d'un intérêt leur donnant qualité à demander l'annulation du permis de construire litigieux, la cour n'a ni commis d'erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits de l'espèce, qu'elle a souverainement appréciés sans les dénaturer."

avocat permis de construire

Comment le juge apprécie-t-il désormais l'intérêt à agir contre un permis de construire devant le Tribunal administratif ?

Une personne ne peut engager un recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’une autorisation de construire que sous réserve de justifier d’un intérêt personnel et direct.

L’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 a introduit dans le code de l’urbanisme une définition légale de l’intérêt à agir.

S'agissant de dispositions nouvelles qui affectent la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative, elles sont, en l'absence de dispositions contraires expresses, applicables aux recours formés contre les permis intervenus après le 19 août 2013, date de leur entrée en vigueur (CE avis, 18 juin 2014, n° 37611 ; CE 11 juillet 2008, association des amis des paysages bourganiauds, n° 313386).

Ces nouvelles règles, destinées à réguler l'accès au prétoire, ne s'appliquent pas aux recours :

- exercés à l'encontre des décisions prises sur déclaration préalable ;
- engagés par l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ;
- engagés par les associations ;
- engagés contre les permis délivrés avant le 19 août 2013.

La recevabilité des recours exclus du champ de la réforme reste subordonnée à l'existence d'un intérêt à agir tel que défini par la jurisprudence.


Avocat depuis près de dix ans, Me Ingelaere pratique exclusivement le droit public. Il a intégré en 2017, puis à nouveau en 2018 le classement des meilleurs avocats français en droit public des affaires (décideurs magazine). En janvier 2019, son cabinet a été élu meilleure firme juridique française pour sa stratégie de croissance aux Trophées du droit Paris. Le cabinet possède trois bureaux, à Paris (Rue du Faubourg Saint Honoré) à Lille et Arras.